
Leclerc annonce arrêter à terme la distribution de catalogues papier en boîte aux lettres. L’impact environnemental du papier est mis en avant. Mais celui de la communication numérique alternative ou les raisons économiques de ce choix sont passés sous silence. Comme pour de précédentes annonces, l’environnement est à nouveau un prétexte bien commode.
Michel-Edouard Leclerc a annoncé hier dans la presse et sur les réseaux sociaux la décision prise par son enseigne. Ainsi, « en 2023, progressivement, tous les magasins E.Leclerc de France vont arrêter de distribuer les prospectus dans les boites aux lettres. Tous auront basculé au 1er septembre 2023, et cela sans attendre les résultats des expérimentations “Oui Pub” organisées dans plusieurs régions françaises. »
A l’appui de cette annonce, outre quelques éléments confus sur la production du papier utilisé par l’enseigne, il ajoute : « C’est en effet un marqueur fort de la volonté des adhérents Leclerc d’opter pour une économie plus durable, plus responsable et décarbonée. » Une campagne de communication massive accompagne cette annonce, incitant les clients de l’enseigne à « passer au catalogue en ligne ».
Two Sides dénonce les arguments utilisés par l’enseigne, qui vont dans le sens d’une numérisation croissante de la relation clients des enseignes de la grande distribution sans jamais informer les consommateurs de la réalité des impacts environnementaux de cette stratégie de marketing numérique.
Pourtant, chacun a pu le constater : cette communication alternative s’appuie sur des applications dédiées, sur des catalogues stockés sur des sites internet et téléchargeables à distance, ou encore sur une communication active sur les réseaux sociaux, incluant de nombreux visuels et vidéos en streaming. Or, une étude sérieuse, récente et publique a établi que pour un catalogue promotionnel couleurs de 36 pages distribué en boîte aux lettres, comparé à une application mobile utilisée à partir de l’envoi d’un emailing intégrant une vidéo, le papier est plus favorable que le numérique pour 15 indicateurs environnementaux sur 16, dont le changement climatique. Il est donc peu vraisemblable qu’une substitution du papier par le numérique contribue à une économie décarbonée.
Il est aujourd’hui bien connu, notamment des grands groupes ayant régulièrement recours aux études d’analyse de cycle de vie, qu’un moindre usage du papier et une moindre production de déchets ne constituent pas un critère suffisant pour garantir un moindre impact environnemental du papier et de la communication commerciale de l’entreprise. Par une information incomplète, ne présentant pas d’élément chiffré ni sourcé, et en ne signalant pas les impacts de la communication numérique alternative, E. Leclerc ne respecte ainsi pas les normes applicables en matière de communication environnementale.
En réalité, dans le contexte actuel d’inflation massive, les enseignes de la grande distribution cherchent à réaliser des économies. Il est malheureusement avéré, comme dans tous les secteurs économiques, que le coût de production d’un catalogue papier a beaucoup augmenté. Two Sides regrette donc que cette annonce, comme celle d’autres enseignes, prenne prétexte d’environnement pour dissimuler une volonté de réduction de coûts.
Two Sides regrette également que ces annonces soient explicitement faites avant d’attendre le bilan de l’expérimentation du Oui-Pub initiée en septembre 2022 en conséquence de la loi Climat et résilience.
La filière graphique avait particulièrement alerté l’État sur l’illusion que représente une expérimentation de cette nature. De fait, une moindre diffusion de prospectus ne signifie pas moins de publicité, mais une autre publicité. Et il était bien évident que des acteurs économiques, a fortiori dans le secteur extrêmement concurrentiel de la grande distribution et dans un contexte économique aussi tendu que celui que nous connaissons, n’allaient pas attendre trois ans avant de prendre leurs dispositions. Tous les éléments économiques, sociaux et environnementaux étaient pourtant à disposition de l’État pour établir que le Stop-Pub, renforcé à peine 18 mois avant la loi Climat par la loi AGEC, est une alternative tout aussi efficace pour que le citoyen puisse exprimer sa préférence. Il n’y a donc aucune nécessité d’anéantir un secteur économique de près de 60 000 emplois locaux et majoritairement d’insertion, ni de favoriser l’explosion d’une pollution numérique largement documentée.
Two Sides appelle ainsi Edouard Leclerc et les enseignes de la grande distribution à communiquer sur les raisons véritables expliquant leurs décisions, dans le respect des normes et réglementations applicables en matière de communication environnementale. Two Sides appelle également l’État à suspendre l’expérimentation du Oui-Pub, avant que des décisions irréversibles pour l’ensemble de la filière papier ne soient prises, aux dépens de l’emploi et de l’environnement.
Consultez ce communiqué au format PDF en cliquant ici et retrouvez les informations utiles sur l’impact environnemental du papier et du numérique sur notre site.
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